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Retrait-gonflement des argiles : un phénomène complexe à gérer

Retrait-gonflement des argiles
Sommaire
Le retrait-gonflement des argiles est un phénomène naturel qui affecte de nombreuses régions en France. Il se manifeste par des mouvements de terrain pouvant causer des dommages importants aux fondations et aux maisons individuelles.

Dans cet article, nous allons explorer les mécanismes de ce phénomène, ses conséquences, ainsi que les moyens de prévention et de gestion des risques associés.

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Les mécanismes du retrait-gonflement des argiles

schema retrait gonflement des argiles
Source : Géorisques

Les processus physiques en jeu

Le retrait-gonflement des argiles est régi par des processus physiques complexes qui se déroulent à l’échelle microscopique. Lorsque la teneur en eau du sol varie, les minéraux argileux subissent des changements de volume importants liés à des phénomènes de succion matricielle et de pression de gonflement.

  • La succion matricielle correspond à la force qui retient l’eau dans les pores du sol. Plus le sol est sec, plus la succion est élevée, et plus les argiles ont tendance à se rétracter.
  • La pression de gonflement est la force exercée par les argiles lorsqu’elles absorbent de l’eau et augmentent de volume. Cette pression peut atteindre plusieurs mégapascals (MPa) et provoquer des dégâts importants sur les fondations et les bâtiments.

✏️ Exemple : Prenons l’exemple d’une argile gonflante comme la smectite. Lorsqu’elle est sèche, la distance entre ses feuillets est faible et le sol présente un volume réduit. Mais lorsque l’eau s’infiltre entre les feuillets, la smectite peut gonfler jusqu’à doubler de volume ! C’est ce gonflement qui exerce une pression sur les fondations et peut causer des dommages.

L’amplitude des variations de volume dépend de plusieurs paramètres clés :

  • La nature des minéraux argileux présents dans le sol : certaines argiles, comme la smectite, sont plus sensibles au retrait-gonflement que d’autres, comme la kaolinite.
  • La teneur en eau initiale du sol : un sol argileux déjà humide subira des variations de volume moins importantes qu’un sol sec.
  • La densité et la porosité du sol : un sol dense et peu poreux limitera les changements de volume, tandis qu’un sol lâche et poreux y sera plus sujet.

🧠 L’info JAQE : Saviez-vous que les sols argileux peuvent subir des variations de volume allant jusqu’à 30% lors des cycles de retrait-gonflement ? C’est considérable et cela explique pourquoi ce phénomène peut causer autant de dégâts sur les constructions.

Il existe des seuils critiques de teneur en eau qui déclenchent des changements significatifs de volume dans les sols argileux. Ces seuils dépendent de la nature des argiles et de leur état de saturation initial. Lorsque la teneur en eau franchit ces seuils, les processus de retrait ou de gonflement s’accélèrent brutalement, entraînant des mouvements de terrain potentiellement dommageables.

Les processus de retrait-gonflement des argiles sont étroitement liés aux propriétés géotechniques des sols, telles que la plasticité et la résistance au cisaillement. Les sols argileux très plastiques et peu résistants au cisaillement seront plus sensibles aux variations de volume et aux déformations induites par les changements de teneur en eau.

Le rôle des minéraux argileux

Les minéraux argileux sont les principaux responsables du retrait-gonflement des sols. Leur structure en feuillets et leur composition chimique leur confèrent des propriétés uniques d’absorption et de rétention d’eau, qui sont à l’origine des variations de volume observées.

Les trois principaux types de minéraux argileux impliqués dans le retrait-gonflement sont :

Minéral Argileux
Structure
Capacité de Gonflement
Sensibilité à la Teneur en Eau
Smectite (Montmorillonite)
Feuillets très expansibles
Élevée (jusqu’à 200% de son volume initial)
Forte
Illite
Feuillets moins expansibles que la smectite
Modérée (jusqu’à 50% de son volume initial)
Moyenne
Kaolinite
Feuillets peu expansibles
Faible (moins de 20% de son volume initial)
Réduite
Tableau des trois principaux type de minéraux argileux
exemple smectite
Smectite – Source : Mineralienatlas

exemple illite
Illite – Source : Weinrich Minerals

exemple kaolinite
Kaolinite – Source : Quarry

Le comportement des minéraux argileux face aux variations de teneur en eau dépend de plusieurs paramètres :

  • La surface spécifique des feuillets : plus elle est grande, plus le minéral argileux peut absorber d’eau et gonfler.
  • La charge électrique des feuillets : elle détermine la force avec laquelle les molécules d’eau sont attirées et retenues dans l’espace interfoliaire.
  • La présence de cations échangeables entre les feuillets : ces ions (calcium, sodium, potassium) influencent la capacité de gonflement des argiles en modifiant l’écartement des feuillets.

🧠 L’info JAQE : La smectite est le minéral argileux le plus redouté dans le domaine de la construction, car sa capacité de gonflement est telle qu’elle peut exercer des pressions de plusieurs mégapascals sur les fondations et les murs, provoquant des dégâts considérables.

À l’échelle moléculaire, les mécanismes d’hydratation et de déshydratation des minéraux argileux mettent en jeu des interactions complexes entre les feuillets, les molécules d’eau et les cations échangeables.

Lors de l’hydratation, les molécules d’eau s’insèrent dans l’espace interfoliaire et s’organisent en couches successives, entraînant un gonflement progressif du minéral argileux.

Lors de la déshydratation, le processus inverse se produit, avec un départ progressif des molécules d’eau et une rétractation des feuillets.

Il est important de noter que dans un sol naturel, différents types de minéraux argileux coexistent et interagissent entre eux. Ces interactions peuvent moduler le comportement global du sol face au retrait-gonflement, en fonction de la proportion et de la répartition des différents minéraux argileux présents.

Les facteurs de prédisposition

La prédisposition d’un sol au retrait-gonflement des argiles dépend de plusieurs facteurs clés qui interagissent entre eux :

  1. Le type de sol et sa composition minéralogique
    • Les sols riches en minéraux argileux gonflants (smectite, illite) sont plus sensibles au retrait-gonflement.
    • La proportion et la répartition des différents types d’argiles dans le sol influencent l’intensité du phénomène.
    • Les sols argileux contenant plus de 30% de smectite sont considérés comme très fortement prédisposés au retrait-gonflement.
  2. La teneur en eau du sol et les conditions hydriques
    • Les variations de teneur en eau, liées aux précipitations et à l’évapotranspiration, sont le moteur du retrait-gonflement des argiles.
    • Un sol argileux soumis à des alternances de périodes humides et sèches sera plus susceptible de subir des variations de volume importantes.
    • Un déficit hydrique prolongé (sécheresse) suivi d’une réhydratation rapide (fortes pluies) constitue une situation particulièrement propice au retrait-gonflement.
  3. Les conditions climatiques et météorologiques
    • Les climats caractérisés par une forte variabilité saisonnière des précipitations et de l’évapotranspiration favorisent le retrait-gonflement des argiles.
    • Les régions soumises à des sécheresses récurrentes et intenses sont plus exposées au phénomène.
    • Le changement climatique, avec l’augmentation prévue des épisodes de sécheresse et des pluies intenses, pourrait accentuer le retrait-gonflement des argiles dans certaines régions.

Pour évaluer la prédisposition d’un sol au retrait-gonflement, plusieurs indicateurs peuvent être utilisés :

  • La teneur en argile du sol, mesurée par des analyses granulométriques
  • La nature et la proportion des différents minéraux argileux, déterminées par des analyses minéralogiques (diffraction des rayons X)
  • L’indice de plasticité du sol (IP), qui reflète sa capacité à changer de volume en fonction de sa teneur en eau
  • Le potentiel de gonflement du sol, mesuré par des essais de gonflement libre ou de gonflement sous charge

Des cartes d’aléa retrait-gonflement des argiles ont été réalisées dans de nombreuses régions pour identifier les zones les plus prédisposées au phénomène. Ces cartes se basent sur des données géologiques, géotechniques et climatiques, et utilisent des modèles prédictifs pour évaluer la probabilité et l’intensité du retrait-gonflement à l’échelle locale.

Les conséquences du retrait-gonflement des argiles

Les dommages aux fondations et aux bâtiments

Le retrait-gonflement des argiles peut causer des dommages importants aux fondations et aux structures des bâtiments. Ces dommages résultent des mouvements différentiels du sol, qui exercent des contraintes mécaniques sur les éléments de construction.

Les principaux types de dommages observés sont :

  1. Les fissures et les lézardes
    • Apparition de fissures verticales ou obliques sur les murs, les cloisons et les façades
    • Élargissement des fissures existantes, pouvant aller jusqu’à la formation de lézardes (fissures de grande largeur)
    • Fissuration des éléments de maçonnerie (briques, parpaings) et des joints entre ces éléments
  2. Les déformations et les désordres structurels
    • Déformation des ouvertures (portes et fenêtres), pouvant entraîner des difficultés d’ouverture et de fermeture
    • Inclinaison ou affaissement des planchers et des dallages
    • Décollement et chute des éléments de finition (carrelage, plinthes)
    • Dans les cas les plus graves, déformation et rupture des éléments porteurs (poutres, poteaux)

L’ampleur et la gravité des dommages causés par le retrait-gonflement des argiles dépendent de plusieurs facteurs :

  • L’intensité et la durée des épisodes de retrait-gonflement, liées aux conditions climatiques et hydrogéologiques locales
  • La nature et la profondeur des fondations, qui déterminent leur sensibilité aux mouvements différentiels du sol
  • La rigidité et la résistance des structures et des éléments de construction, qui conditionnent leur capacité à s’adapter aux déformations imposées par le sol

🧠 L’info JAQE : Saviez-vous que les dommages causés par le retrait-gonflement des argiles peuvent se manifester de manière progressive, parfois sur plusieurs années ? C’est pourquoi il est important de surveiller régulièrement l’apparition et l’évolution des fissures et des déformations sur les bâtiments, afin de détecter au plus tôt les signes de désordres liés à ce phénomène.

Les interactions entre le sol et les fondations jouent un rôle clé dans le développement des dommages liés au retrait-gonflement des argiles. Lorsque les fondations ne sont pas suffisamment profondes ou résistantes, elles peuvent être entraînées par les mouvements du sol, transmettant ainsi les déformations à la structure du bâtiment.

À l’inverse, des fondations bien dimensionnées et ancrées dans un horizon stable peuvent atténuer les effets du retrait-gonflement et limiter les dommages.

Des seuils de déformation et de tassement différentiel ont été établis pour évaluer la gravité des dommages aux bâtiments. On considère généralement que des tassements différentiels supérieurs à 1/300 de la longueur de l’ouvrage ou des déformations angulaires supérieures à 1/200 peuvent entraîner des dommages structurels importants et nécessiter des travaux de réparation lourds.

Pour évaluer et quantifier les dommages causés par le retrait-gonflement des argiles, des méthodes d’inspection et de diagnostic ont été développées. Elles comprennent notamment :

  • L’examen visuel détaillé des fissures et des déformations, avec relevé de leur localisation, de leur orientation et de leur évolution dans le temps
  • La mise en place de témoins de fissure pour suivre l’ouverture et le rejeu des fissures
  • La réalisation de mesures topographiques pour évaluer les tassements différentiels et les déformations de la structure
  • L’utilisation de capteurs et d’instrumentations pour suivre les mouvements du sol et des fondations

Ces méthodes permettent d’établir un diagnostic précis de l’état du bâtiment et d’orienter les choix de réparation et de confortement les plus adaptés.

Les fissures et les déformations

exemple fissure
Source : AQC

Les fissures et les déformations sont les manifestations les plus courantes des dommages causés par le retrait-gonflement des argiles. Elles peuvent affecter tous les éléments du bâtiment, des fondations jusqu’aux éléments de finition.

On distingue plusieurs types de fissures caractéristiques :

  1. Les fissures verticales
    • Localisées près des angles de murs ou des ouvertures (portes, fenêtres)
    • Souvent accompagnées d’un décollement entre les éléments de maçonnerie
    • Témoignent d’un tassement différentiel des fondations
  2. Les fissures obliques
    • Partent des angles des ouvertures et se propagent vers le haut ou le bas
    • Révèlent une déformation de cisaillement de la structure, souvent liée à un tassement différentiel important
  3. Les fissures horizontales
    • Situées à la base des murs ou au niveau des planchers
    • Indiquent un décollement entre les éléments porteurs et les éléments portés, dû à un tassement différentiel

Les fissures liées au retrait-gonflement des argiles ont tendance à évoluer dans le temps, en fonction des cycles d’humidification et de dessiccation du sol. Elles peuvent s’ouvrir et se fermer alternativement, voire se propager et s’élargir si les mouvements du sol persistent.

Pour distinguer les fissures dues au retrait-gonflement des argiles des fissures ayant d’autres origines (tassement de remblai, défaut de construction, etc.), plusieurs indices peuvent être observés :

  • L’absence de désordre dans les structures voisines ou dans les réseaux enterrés, qui écarte l’hypothèse d’un mouvement de grande ampleur du sol
  • La présence de signes de dessiccation du sol autour du bâtiment (sol craquelé, végétation en souffrance)
  • La corrélation entre l’apparition ou l’aggravation des fissures et les périodes de sécheresse prolongée

🧠 L’info JAQE : Il est important de surveiller régulièrement l’évolution des fissures dues au retrait-gonflement des argiles. Pour cela, vous pouvez mettre en place des témoins de fissure, qui sont de petites plaques de plâtre ou de verre collées de part et d’autre de la fissure. Si la fissure évolue, le témoin se casse, ce qui vous alerte sur la nécessité de faire des investigations plus poussées.

La formation et la propagation des fissures sont influencées par les caractéristiques des matériaux de construction. Les murs en maçonnerie de briques ou de parpaings sont plus sensibles à la fissuration que les murs en béton banché, car les joints entre les éléments constituent des points de faiblesse.

De même, les cloisons légères en plaques de plâtre sont plus sujettes aux déformations que les cloisons en carreaux de plâtre.

Il existe des seuils de largeur et de longueur de fissure qui peuvent guider les décisions d’intervention :

Largeur de fissure
Action recommandée
< 0,2 mm
Rebouchage esthétique
0,2 à 2 mm
Surveillance régulière et traitement si évolution
> 2 mm
Investigations approfondies (sondages, instrumentation) et travaux de réparation
Tableau des actions en fonction des seuils de largeur de fissure

Les techniques de réparation des fissures dépendent de leur type et de leur gravité. Elles vont du simple calfeutrement avec un mastic souple pour les fissures superficielles, jusqu’à la mise en place de chaînages, de tirants ou de micropieux pour les fissures structurelles.

Dans tous les cas, il est recommandé de faire appel à un professionnel spécialisé pour obtenir un diagnostic précis et une préconisation de travaux adaptée.

Les coûts économiques et sociaux

Le retrait-gonflement des argiles engendre des coûts économiques considérables, tant pour les particuliers que pour la collectivité. Ces coûts se répartissent en plusieurs catégories :

  1. Les coûts directs de réparation des dommages
    • Travaux de reprise en sous-œuvre des fondations
    • Réparation des fissures et des désordres structurels
    • Remplacement des éléments endommagés (menuiseries, revêtements)
  2. Les coûts indirects liés aux perturbations et aux pertes d’usage
    • Relogement temporaire des occupants pendant les travaux
    • Perte de valeur vénale du bien immobilier
    • Difficultés de revente ou de location du bien

✏️ Exemple : Prenons le cas de M. et Mme Dupont, propriétaires d’une maison individuelle touchée par le retrait-gonflement des argiles. Suite à l’apparition de fissures et de déformations importantes, ils ont dû engager des travaux de reprise en sous-œuvre des fondations, pour un montant de 50 000 €.

Pendant les 3 mois de travaux, ils ont dû être relogés dans un appartement loué, ce qui leur a coûté 3 000 € supplémentaires. De plus, ils estiment que la valeur de leur maison a diminué de 20% en raison des désordres subis, soit une perte de 40 000 € par rapport à sa valeur initiale.

À l’échelle nationale et selon une étude de France Assureurs, le coût global des dommages liés au retrait-gonflement des argiles est estimé à environ 1 milliard d’euros par an, ce qui en fait le deuxième poste d’indemnisation des catastrophes naturelles après les inondations. Il est passé de 400 millions d’euros par an en moyenne sur la période 1989-2015 à 1 milliard d’euros par an en moyenne sur la période 2016-2020.

Ce coût a tendance à augmenter avec le changement climatique, qui accentue la fréquence et l’intensité des épisodes de sécheresse.

Les coûts liés au retrait-gonflement des argiles sont en grande partie pris en charge par le régime d’assurance des catastrophes naturelles (Cat-Nat), qui repose sur une surprime obligatoire prélevée sur les contrats d’assurance habitation.

Cependant, ce régime est de plus en plus fragilisé par l’augmentation des sinistres, ce qui pose des questions sur sa pérennité et sur l’évolution des modalités de couverture des dommages.

🧠 L’info JAQE : En France, depuis 1989, le retrait-gonflement des argiles a fait l’objet de plus de 11 000 reconnaissances de l’état de catastrophe naturelle, sur environ 9 000 communes. Cela représente en moyenne 300 à 400 communes reconnues chaque année, avec des pics lors des années de sécheresse exceptionnelle (2003, 2018).

Au-delà des coûts économiques, le retrait-gonflement des argiles a également des conséquences sociales et humaines importantes pour les populations touchées. Les propriétaires de maisons individuelles sont souvent démunis face à l’ampleur des dommages et aux démarches à entreprendre pour obtenir une indemnisation. Les travaux de réparation peuvent être longs et contraignants, entraînant une dégradation de la qualité de vie et parfois des problèmes de santé liés au stress et à l’inconfort.

Le retrait-gonflement des argiles peut aussi avoir un impact sur l’attractivité et le dynamisme des territoires touchés. La dévalorisation des biens immobiliers et la difficulté à obtenir des prêts bancaires pour l’acquisition de biens en zone à risque peuvent freiner le développement local et accentuer les inégalités territoriales.

Face à ces enjeux, les pouvoirs publics et les acteurs économiques mettent en place des stratégies pour prévenir et mutualiser les coûts liés au retrait-gonflement des argiles :

  • Amélioration de la connaissance et de la cartographie de l’aléa, pour mieux identifier les zones à risque et adapter les règles de construction
  • Sensibilisation et information des populations, pour favoriser l’adoption de mesures de prévention et de protection individuelles
  • Évolution des normes de construction et des techniques de réparation, pour renforcer la résilience des bâtiments face au retrait-gonflement des argiles
  • Réflexion sur l’évolution du régime Cat-Nat, pour assurer une meilleure adéquation entre les primes préle

La prévention et la gestion des risques

La cartographie des zones à risque

La cartographie de l’aléa retrait-gonflement des argiles est un outil essentiel pour identifier les zones exposées à ce phénomène et pour adapter les mesures de prévention et de protection en conséquence. Elle permet de représenter, à différentes échelles, la probabilité et l’intensité des mouvements de terrain liés aux variations de volume des sols argileux.

Il existe plusieurs types de cartes d’aléa retrait-gonflement des argiles :

  1. Les cartes nationales, à l’échelle 1/1 000 000, qui donnent une vision d’ensemble de la répartition de l’aléa sur le territoire français
  2. Les cartes départementales, à l’échelle 1/50 000, qui précisent le niveau d’aléa par commune et par formation géologique
  3. Les cartes locales, à l’échelle 1/10 000 ou 1/5 000, qui détaillent le niveau d’aléa à l’échelle de la parcelle cadastrale

carte alea retrait gonflement argiles loiret
Source : Loiret Gouv

On peut y voir les différents niveaux d’aléa (fort, moyen, faible) représentés par des couleurs différentes, ainsi que les contours des communes et les principales formations argileuses affleurantes.

Ces cartes sont réalisées en croisant plusieurs types de données :

  • Les données géologiques, qui renseignent sur la nature et la répartition des formations argileuses
  • Les données géotechniques, issues de sondages et d’essais de laboratoire, qui caractérisent les propriétés de gonflement des sols
  • Les données climatiques, qui permettent d’évaluer la probabilité et l’intensité des épisodes de sécheresse
  • Les données sur les sinistres recensés, qui apportent des informations sur la localisation et la fréquence des dommages liés au retrait-gonflement des argiles

La réalisation de ces cartes fait appel à des méthodes de cartographie numérique et à des modèles prédictifs, qui combinent ces différentes sources de données pour produire une évaluation spatialisée de l’aléa.

🧠 L’info JAQE : Les cartes d’aléa retrait-gonflement des argiles sont consultables gratuitement sur le site www.georisques.gouv.fr, qui permet de visualiser le niveau d’exposition d’un terrain ou d’une commune à ce phénomène. Il est recommandé de consulter ces cartes avant tout projet d’achat ou de construction, pour évaluer le risque et adapter les mesures de prévention en conséquence.

Il est important de noter que ces cartes comportent une part d’incertitude, liée à la qualité et à la densité des données utilisées pour les établir. Elles ne peuvent pas prédire avec certitude la survenance et l’intensité des mouvements de terrain en un point donné, mais elles donnent une indication probabiliste du niveau d’aléa.

L’utilisation de ces cartes doit donc être adaptée en fonction des besoins et des publics cibles :

  • Pour les particuliers, elles permettent de s’informer sur le niveau d’exposition de leur bien et d’adopter des mesures de prévention individuelles
  • Pour les professionnels de la construction, elles servent de base pour définir les règles de construction et les techniques de fondation adaptées au niveau d’aléa
  • Pour les collectivités, elles constituent un support pour élaborer les documents d’urbanisme et les plans de prévention des risques naturels (PPRN)

Au fil du temps, la précision et la fiabilité des cartes d’aléa retrait-gonflement des argiles se sont améliorées, grâce à l’acquisition de nouvelles données et au perfectionnement des modèles.

Cependant, l’actualisation régulière de ces cartes reste un défi, car elle nécessite de prendre en compte les évolutions climatiques et les retours d’expérience des sinistres.

L’enjeu est d’intégrer ces cartes dans une politique globale de gestion des risques naturels, en articulation avec les autres outils de connaissance, de prévention et de protection. Cela suppose une collaboration étroite entre les différents acteurs (État, collectivités, assureurs, professionnels) et une sensibilisation des populations exposées.

La réglementation et les normes de construction

La prise en compte du risque de retrait-gonflement des argiles dans la construction fait l’objet d’une réglementation spécifique, qui vise à prévenir les dommages aux bâtiments et à assurer la sécurité des occupants.

Cette réglementation s’appuie sur plusieurs textes de référence :

  • La loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, qui a introduit les Plans de Prévention des Risques Naturels (PPRN) retrait-gonflement des argiles
  • Le décret du 22 octobre 2010 relatif à la classification et aux règles de construction parasismique applicables aux bâtiments de la classe dite « à risque normal », qui intègre des dispositions relatives au retrait-gonflement des argiles
  • L’arrêté du 22 juillet 2020 relatif aux techniques particulières de construction dans les zones exposées au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols

Ces textes réglementaires se traduisent par des normes techniques et des règles de l’art que les professionnels de la construction doivent respecter pour prévenir les dommages liés au retrait-gonflement des argiles.

Ces dispositions sont détaillées dans les référentiels techniques comme le DTU 13.12 « Règles pour le calcul des fondations superficielles » et le fascicule 62 « Règles techniques de conception et de calcul des fondations des ouvrages de génie civil ». Leur application est obligatoire pour les constructions neuves dans les zones exposées au retrait-gonflement des argiles.

Les PPRN retrait-gonflement des argiles, élaborés par les services de l’État, précisent les règles d’urbanisme et de construction à respecter en fonction du niveau d’aléa. Ils définissent un zonage réglementaire (zones rouges, bleues et blanches) et des prescriptions associées, qui peuvent aller jusqu’à l’interdiction de construire dans les zones les plus exposées.

🧠 L’info JAQE : En France, en avril 2023, 171 PPRN retrait-gonflement des argiles ont été approuvés, couvrant plus de 7 500 communes. Ils concernent principalement les départements les plus exposés à l’aléa, comme la Haute-Garonne, le Gers, le Tarn-et-Garonne ou encore le Loiret.

Le respect de ces réglementations engage la responsabilité des constructeurs et des maîtres d’ouvrage. En cas de sinistre lié au retrait-gonflement des argiles, le non-respect des règles de construction peut entraîner une réduction ou une exclusion de la garantie décennale. Les assureurs sont également de plus en plus attentifs à la prise en compte de ce risque dans les projets de construction qu’ils assurent.

Cependant, l’application effective de ces réglementations sur le terrain soulève plusieurs difficultés :

  • Le contrôle du respect des règles de construction est complexe, notamment pour les maisons individuelles auto-construites ou réalisées sans maître d’œuvre
  • Les surcoûts liés à la mise en œuvre des dispositions constructives peuvent freiner leur application, en particulier pour les projets de petite taille
  • Les interactions avec les autres réglementations (thermique, parasismique, accessibilité) peuvent générer des contradictions ou des difficultés de mise en œuvre

Pour améliorer l’effectivité de ces réglementations, plusieurs pistes sont envisagées :

  • Renforcer l’information et la sensibilisation des particuliers et des professionnels sur les enjeux et les solutions techniques liés au retrait-gonflement des argiles
  • Développer des outils et des guides pratiques pour faciliter l’appropriation et l’application des règles de construction par les acteurs de terrain
  • Intégrer la prévention du risque de retrait-gonflement des argiles le plus en amont possible dans les projets, dès la phase de conception

À l’avenir, ces réglementations devront également évoluer pour mieux prendre en compte les impacts du changement climatique sur le phénomène de retrait-gonflement des argiles. L’augmentation attendue de la fréquence et de l’intensité des épisodes de sécheresse pourrait nécessiter un renforcement des exigences constructives dans les zones exposées.

Les solutions constructives et les mesures de prévention

Pour prévenir les dommages liés au retrait-gonflement des argiles, il est recommandé de réaliser une étude géotechnique préalable à la construction, afin de caractériser la sensibilité du sol et d’adapter les fondations en conséquence.

D’ailleurs, les études de sol préalables à la construction ne se limitent pas à caractériser la sensibilité du sol au retrait-gonflement des argiles. Elles permettent également de détecter d’autres risques géologiques pouvant affecter les fondations, comme la présence de cavités souterraines (naturelles ou anthropiques) susceptibles de provoquer des effondrements.

Le coût des études géotechniques varie en fonction de la surface du terrain et de la complexité du sol, mais il faut compter en moyenne entre 1500 et 3000 euros pour une maison individuelle.

Ces solutions concernent principalement les fondations et la structure du bâtiment, mais aussi la gestion des eaux et de la végétation aux abords.

Voici les principales dispositions constructives recommandées :

  1. Fondations profondes et rigides
    • Ancrage des fondations dans un horizon de sol stable, peu sensible au retrait-gonflement (au moins 0,80 à 1,20 m de profondeur)
    • Réalisation de fondations continues, dimensionnées pour résister aux efforts différentiels (semelles filantes, radier général)
    • Utilisation de matériaux peu sensibles aux variations d’humidité (béton armé, maçonnerie de blocs pleins)
  2. Rigidification de la structure
    • Mise en place de chaînages horizontaux et verticaux, pour solidariser les éléments de la structure et répartir les efforts
    • Réalisation d’une ceinture périphérique en béton armé au niveau des fondations, pour éviter les déformations différentielles
    • Utilisation de planchers béton et de refends porteurs, pour apporter de la rigidité à la structure
  3. Gestion des interfaces et des points singuliers
    • Désolidarisation des éléments de second œuvre (cloisons, carrelages) par rapport à la structure, pour éviter les fissures
    • Mise en place de joints de rupture ou de dilatation, pour absorber les mouvements différentiels
    • Renforcement des points singuliers (angles, ouvertures) par des armatures ou des renforts métalliques

🧠 L’info JAQE : Une étude réalisée par l’Agence Qualité Construction a montré que la mise en œuvre de fondations adaptées permettait de réduire de 60 à 90% le nombre de sinistres liés au retrait-gonflement des argiles, par rapport à des fondations classiques non dimensionnées pour ce risque.

En complément de ces dispositions constructives, des mesures de prévention relatives à la gestion des eaux et de la végétation doivent être adoptées :

  • Éloignement des arbres et arbustes à une distance au moins égale à leur hauteur à maturité, pour éviter qu’ils ne pompent l’eau du sol au droit des fondations
  • Création d’un écran anti-racines vertical autour des fondations, pour empêcher la progression des racines sous le bâtiment
  • Mise en place d’un dispositif de drainage périphérique, pour collecter et évacuer les eaux pluviales loin des façades
  • Étanchéification et entretien régulier des réseaux d’eaux (canalisations, regards) pour éviter les fuites et infiltrations dans le sol

La mise en œuvre de ces solutions constructives représente un surcoût par rapport à des techniques de construction classiques. Mais ce surcoût est largement compensé par les bénéfices en termes de prévention des dommages et de pérennité du bâtiment.

À titre indicatif, le coût des dispositions parasismiques et para-argiles représente environ 5 à 10% du coût total de construction pour une maison individuelle.

Pour les bâtiments existants, des solutions de réparation et de confortement peuvent être mises en œuvre après un sinistre, comme le renforcement des fondations par micro-pieux, la pose de tirants d’ancrage ou l’injection de résine dans les fissures. Mais ces solutions sont souvent plus coûteuses et moins efficaces qu’une prévention en amont.

Le développement et la diffusion de ces solutions passent par plusieurs leviers :

  • La formation et la qualification des professionnels (architectes, bureaux d’études, entreprises) aux techniques de construction adaptées au retrait-gonflement des argiles
  • L’intégration de ces solutions dans les référentiels techniques et les règles de l’art (DTU, normes, guides pratiques)
  • La sensibilisation des maîtres d’ouvrage et des particuliers à l’importance de la prévention et aux bénéfices des solutions constructives
  • L’incitation financière et assurantielle à la mise en œuvre de ces solutions, par des mécanismes de modulation de franchise ou de prime en fonction du niveau de prévention

À l’avenir, ces solutions constructives sont amenées à évoluer, en lien avec l’innovation technique et les retours d’expérience. Des pistes de recherche et développement portent notamment sur :

  • L’utilisation de nouveaux matériaux (bétons fibrés, géotextiles, polymères) pour renforcer la résistance et la flexibilité des fondations et des structures
  • La mise au point de techniques de fondations adaptatives, capables de s’ajuster aux mouvements du sol (fondations sur vérins, sur plots coulissants)
  • L’instrumentation et le monitoring des bâtiments, pour suivre en temps réel les déformations et adapter les solutions de confortement

⭐️ 4 points clés à retenir :

  1. Le retrait-gonflement des argiles est un phénomène naturel influencé par la composition des sols et les conditions climatiques.
  2. Ce phénomène peut causer d’importants dommages aux bâtiments, particulièrement aux maisons en maçonnerie.
  3. Pour prévenir ces risques, des actions telles que la cartographie de l’aléa et l’adaptation des règles de construction sont nécessaires, impliquant divers acteurs.
  4. Face à son augmentation prévue avec le changement climatique, renforcer la prévention et la résilience des territoires est essentiel.

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